Lancée en 2009, l’expérimentation du contrôle des arrêts de travail des fonctionnaires par les caisses primaires d’assurance maladie “n’a pas démontré de valeur ajoutée”, juge un rapport d’inspection rendu public vendredi 18 novembre. “Il est indispensable que l’État définisse une stratégie vis-à-vis de l’absentéisme”, recommande le document.
Réclamé par les parlementaires, le rapport d’évaluation du dispositif expérimental de contrôle des arrêts de travail des fonctionnaires par 6 caisses primaires d’assurance maladie vient d’être dévoilé. Réalisé conjointement par les trois inspections générales de l’Administration (IGA), des Affaires sociales (Igas) et des Finances (IGF), ce document [cliquez ici pour le consulter], en date de décembre 2015 et mis en ligne vendredi 18 novembre 2016, pointe “un bilan lacunaire et peu exploitable” de l’expérimentation.
Initiée par la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2010, cette expérimentation visait prioritairement à renforcer le contrôle des arrêts maladie des fonctionnaires et ce in fine dans le but d’“harmoniser les règles et modalités de ces contrôles avec ceux des assurés relevant du régime général”.
Par cette publication, les députés ont donc obtenu gain de cause. Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2017, à l’occasion duquel les parlementaires ont mis fin à l’expérimentation de ce dispositif [cliquez ici pour consulter notre article sur le sujet], ces derniers avaient, en effet, réclamé la publication de ce rapport
Choix initiaux “discutables”
À en croire les corps d’inspection, l’expérimentation a, dès ses débuts, été marquée par des choix “discutables”, la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) n’ayant pas préalablement défini des cibles de contrôle. “Les critères retenus ont été ceux habituellement utilisés pour les salariés du privé”, précise le rapport.
“Un défaut de cadrage”, selon les termes des inspections, qui a notamment conduit l’expérimentation à se concentrer sur le contrôle des congés maladie de longue durée (entre quarante-cinq jours et six mois). “Or cette cible apparaît peu cohérente au regard des besoins exprimés par les administrations, bien plus affectées dans leur fonctionnement courant par les absences de très courte (moins de sept jours) et courte durée (de huit à trente jours)”, souligne le document.
Aucune conséquence tirée
Est également pointée du doigt l’absence de diagnostic préalable et d’enquête de terrain avant la définition du cahier des charges de l’expérimentation. Ceci “obérant ainsi toute possibilité d’évaluer la plus-value de cette dernière à son terme”, précisent l’IGA, l’IGF et l’Igas.
L’expérimentation n’a ensuite conduit “ni à harmoniser les règles et modalités de contrôle des assurés et des fonctionnaires, ni à prévenir ou dissuader l’usage abusif de congés de maladie, souligne le rapport. Les administrations n’ont tiré que très peu de conséquences concrètes des retours des contrôles médicaux réalisés par les médecins-conseils de l’assurance maladie, lorsque ces derniers relevaient le caractère injustifié d’un arrêt de travail.”
Dans 85 % des cas, les arrêts injustifiés n’ont ainsi donné lieu à aucune suite. “Cela démontre que les services ne se sont pas appropriés à l’expérimentation, faute d’un pilotage rapproché. Les données disponibles au terme de cinq années de mise en œuvre ne permettent nullement d’évaluer le nombre d’arrêts de travail évités”, ajoute le rapport.
Clarifier les objectifs et évaluer
Tout en recommandant de ne pas poursuivre cette expérimentation “moribonde” – chose désormais faite depuis l’adoption d’un amendement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2017 –, le rapport des inspections recommande à l’État de “définir pour l’avenir une stratégie volontariste vis-à-vis de l’absentéisme médical”. Cette dernière devant emprunter “d’autres voies que le seul alignement, souvent inadéquat, sur le secteur privé”, ajoute le doucement.
Les corps d’inspection recommandent ainsi aux pouvoirs publics de se positionner “expressément” sur les objectifs à atteindre en termes de contrôles des arrêts maladie. Ces deniers doivent être “clarifiés, hiérarchisés, assumés et leur mise en œuvre doit être accompagnée, suivie et évaluée”.